Une démarche inédite
Pour quelles raisons avez-vous souhaité lancer une enquête en ligne, au début de la démarche prospective de la Flotte océanographique française ?
Nous avons lancé la démarche « Imaginons la Flotte océanographique française à l’horizon 2035 » en mars 2023. Le sondage a été envoyé entre juin et août 2023. Nous souhaitions savoir comment la communauté des utilisateurs appréhendait la décarbonation. Nous nous doutions que les scientifiques étaient demandeurs de réduire l’impact environnemental de leurs activités de recherche, mais nous voulions comprendre jusqu'à quel point. Nous souhaitions recueillir les opinions de chacun sur les différentes pistes évoquées a priori. L’originalité de la flotte, c’est qu’elle est utilisée par des scientifiques qui font des choses très différentes. Il s’agissait donc aussi d’analyser les variations d’opinion d’une discipline à l’autre.
En termes de participation, quel est le bilan du sondage ?
Sur 1300 invitations envoyées, environ 500 personnes ont commencé à répondre au sondage. Nous avons finalement obtenu 230 réponses complètes, que nous avons enrichies d’entretiens plus approfondis, à partir d’un panel qui nous semblait représentatif. Nous sommes satisfaits que 65% des répondants soient extérieurs à l’Ifremer.
Quels enseignements tirez-vous de cette enquête ?
Tout d’abord, sans surprise, nous avons obtenu la confirmation que la communauté qui utilise les moyens de la Flotte océanographique française est très impliquée dans la décarbonation. Ce n’était sans doute pas le cas il y a une dizaine d’années. C’est bien l’ensemble de la communauté qui demande à ce que la Flotte océanographique française soit exemplaire en réduisant ses émissions de gaz à effet de serre.
Le sondage met également en évidence les attentes des scientifiques vis-à-vis des technologies. Ils pensent majoritairement que la propulsion à voile ou les drones peuvent soutenir la réduction de l’impact des activités de recherche.
La piste d’une meilleure valorisation des données produites fait aussi l’unanimité. Il n’est plus acceptable que des données acquises lors de campagnes océanographiques dorment sur un disque dur par manque de temps ou de moyens pour les analyser.
On constate un autre consensus autour du prépositionnement des navires et de la mutualisation des campagnes avec nos partenaires étrangers. Cela nous conforte dans l’idée qu'une des priorités est de revoir la façon de programmer et d’organiser les appels à projet permettant d’accéder aux navires.
En revanche, l’enquête en ligne révèle qu’il n’y a pas convergence autour de la réduction de la vitesse des navires. Plusieurs craintes découlent de cette idée : allongement de la durée des missions, risque de réduction du temps consacré aux activités scientifiques si le temps de transit augmente…
Y a-t-il des points d’attention particuliers qui vont vous guider dans la suite de la démarche ?
L’un des pré-requis, c’est de continuer à offrir un niveau de service aux scientifiques au moins équivalent en qualité et quantité, quels que soient les leviers de décarbonation que l’on mettra en œuvre. Je retiens également le souhait que la Flotte océanographique française accompagne les chefs de mission par des formations, le partage de données et d’outils. C’est ce que nous avons commencé à faire, notamment à travers la réalisation du bilan carbone, mais nous devrons aller plus loin.
Enfin, nous avons choisi d’emblée de nous concentrer sur les émissions de carbone. Mais nous constatons, à travers le sondage, qu’il y a des attentes sur les autres impacts environnementaux, comme la pollution plastique, la génération de bruit sous-marin… Ce n’est pas l’objet de notre démarche actuelle, mais nous devons y être attentifs.
>> Accéder au rapport d’analyse de l’enquête en ligne :