Halieutique

Pour connaître les dynamiques des populations de poissons et de macro-invertébrés comme les langoustines ou les coquilles Saint-Jacques, l’Ifremer mène l’enquête aussi bien en mer qu’à terre. L’Institut organise chaque année des campagnes scientifiques à bord des navires océanographiques. Ces informations sont complétées par des études très variées, de la génétique des poissons à l’économie de la pêche, en passant par le suivi des activités de pêche et des débarquements.

La Flotte océanographique française est mobilisée pour réaliser des campagnes en mer qui permettent d'obtenir de nombreuses informations sur les individus, les populations et sur l’écosystème dont les ressources dépendent. En particulier, elles fournissent, en routine, des indices d'abondance et les distributions géographiques des populations. Leur répétition annuelle nous éclaire sur les évolutions. Différentes méthodes sont utilisées, comme des chaluts à panneaux pour les espèces démersales (merlu, baudroies), des chaluts à perche (pour la sole par exemple) et des dragues (pour la coquille Saint-Jacques). Pour les espèces pélagiques, on a également recours à des analyses acoustiques. Récemment un drone de surface équipé de sondeurs a par ailleurs été employé.

La campagne Pelgas se déroule, par exemple, chaque année en mai, à bord du Thalassa. Au-delà de l’estimation de la biomasse des populations de poissons, elle vise plus largement à surveiller l’écosystème pélagique du golfe de Gascogne. « Au départ, il s’agissait d’une approche pionnière », précise Pierre Petitgas, directeur adjoint du département Ressources biologiques et environnement (RBE) de l’Ifremer. « On s’est rendu compte qu’on ne pouvait plus envisager la pêche sans prendre en compte les interconnexions entre les espèces et l’environnement », complète Mathieu Doray, chercheur au laboratoire Écologie et modèles pour l’halieutique (EMH) de l’Ifremer à Nantes, en charge de Pelgas depuis dix ans.

"Nous devons maintenir des séries temporelles longues pour comprendre et anticiper l'impact des pressions anthropiques sur les écosystèmes. Depuis deux décennies, nous surveillons les effets de la pêche auxquels s’ajoute le dérèglement climatique qui s’accélère. "

Mathieu Doray, chercheur au laboratoire Écologie et modèles pour l’halieutique (EMH) de l’Ifremer à Nantes

Comme la plupart des campagnes halieutiques règlementaires, cette mission récurrente est cofinancée par l’Union européenne et répond à des protocoles standardisés et optimisés au niveau européen. « C’est une des contraintes spécifiques à notre discipline qui nous laisse peu de marge de manœuvre car les adaptations de nos protocoles doivent être discutées avec nos collègues européens. Par ailleurs, nous devons maintenir des séries temporelles longues pour comprendre et anticiper l'impact des pressions anthropiques sur les écosystèmes. Depuis deux décennies, nous surveillons les effets de la pêche auxquels s’ajoute le dérèglement climatique qui s’accélère », constate Mathieu Doray qui a co-animé avec Pierre Petitgas le groupe de travail « Halieutique » dans le cadre de la démarche « Imaginons la Flotte océanographique française à l’horizon 2035 ».

Autre enjeu : l’évolution des méthodes de prélèvement vers des techniques aux répercussions moindres pour la biodiversité. En revanche, pour les espèces de fond par exemple, il existe pour l’instant peu d’alternative au chalut : l’utilisation de caméras remorquées par un navire reste limitée à certaines zones ou espèces.

Dans ce contexte, la communauté halieutique s’en remet aux nouvelles technologies. L’ADN environnemental ou les drones de surface font d’ores et déjà partie du paysage. Et la réflexion au sujet du déploiement de capteurs automatisés sur les champs d’éoliennes en mer se concrétise petit à petit. Des outils qui permettront aussi de répondre à l’un des défis pour les années à venir : l’accès aux zones règlementées, comme les aires marines protégées ou les espaces réservés à la production d’énergie renouvelable.