Campagne Manta-Ray : un voilier déployé

Pour la première fois, la Flotte océanographique française a déployé un voilier lors d'une mission scientifique. Cette opération, à l’empreinte carbone minimale, a été réalisée pour la campagne d'exploration des fonds marins des Antilles Manta-Ray-Recup.

Depuis 2022, les campagnes Manta-Ray explorent les fonds marins des Petites Antilles. L'objectif est de mieux comprendre la sismicité dans cette zone de subduction, unique en France, où la plaque océanique nord-américaine plonge sous la plaque caraïbe. « Nous étudions les cycles d'eau dans les zones de subduction, explique Frauke Klingelhoefer, chercheuse à l’Ifremer. Les fluides emprisonnés jouent un rôle crucial dans la génération et les caractéristiques des séismes. »

Récupérer le piézomètre remonté à la surface

Ces campagnes combinent des opérations d'envergure et une approche innovante. En 2022 et 2023, deux navires de la Flotte océanographique française L’Atalante et le Pourquoi pas ? ont déployé des sismomètres et permis de réaliser des carottages de sédiments. Le Pourquoi pas ? était indispensable, car « il se positionne très exactement, même dans des conditions complexes avec des courants différents selon la profondeur », précise Frauke Klingelhoefer. Le premier objectif était d'installer précisément un piézomètre à 4400 mètres de profondeur, sur un volcan de boue. Il s'est enfoncé de 2,5 mètres dans les sédiments, pour fournir des données sur la pression des fluides dans cette zone stratégique.

En novembre 2024, après un an et demi de mesures, le catamaran Ulysse opéré par la société Oceops s’est rendu à la verticale du volcan. Grâce à une commande acoustique, la partie principale du piézomètre a été libérée de son lest. Après deux heures de remontée, elle est apparue à la surface pour être embarquée. « Le piézomètre, qui pèse seulement une centaine de kilos, était compatible avec un voilier, souligne Frauke Klingelhoefer. Nous avons assuré une mission efficace, en limitant l’empreinte carbone. »

« C'est une première, c'est prometteur »

Pour cette récupération, le catamaran représente une alternative innovante aux grands navires. « Faire naviguer un voilier pour une mission scientifique, c'est une première pour la Flotte océanographique française, indique Goulwen Peltier, responsable des opérations navales de la Flotte océanographique française à l'Ifremer. C'est prometteur ! La réactivité d’Oceops et sa souplesse ont été essentielles. Nous avons collaboré efficacement malgré nos exigences institutionnelles, notamment en matière d'utilisation d'un budget public. Les aspects juridiques sont aussi importants et Oceops a su répondre à ces contraintes ».

Pour des missions de ce type, un voilier est une solution rapide idéale qui mobilise peu de moyens, « mais les grands navires restent indispensables pour des opérations lourdes », note Frauke Klingelhoefer. L’utilisation de navires peu motorisés répond à l'engagement de la Flotte océanographique française à réduire son empreinte carbone. « Ces solutions complètent nos capacités et réduisent notre impact environnemental », résume Goulwen Peltier.